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Bail commercial : exception d’inexécution et suspension du loyer sans mise en demeure
Dans un marché locatif où les obligations du bailleur sont parfois considérées comme allant de soi, un principe juridique refait surface et vient redéfinir l’équilibre entre bailleur et locataire commercial : l’exception d’inexécution. Ce mécanisme, bien connu des juristes mais sous-estimé par de nombreux bailleurs, permet au locataire de suspendre le paiement de son loyer sans mise en demeure préalable, si les locaux ne sont plus exploitables.
Le problème ? C’est souvent le bailleur qui en subit les conséquences sans en comprendre les tenants juridiques. Quand un locataire cesse soudainement de payer, la réflexe est de penser à un impayé abusif. Mais il se peut que ce soit parfaitement légal.
Décryptage d’une décision de justice qui clarifie ce droit, avec un regard critique (et constructif) pour les investisseurs immobiliers et gestionnaires de patrimoine.
Quand le local devient inexploitable
Un locataire se maintient dans un local commercial mais cesse de payer son loyer car le local est touché par des infiltrations d’eau graves, compromettant l’exploitation normale de son activité.
En réponse, le bailleur l’assigne : il exige les loyers et l’expulsion. Jusque-là, scénario classique.
Mais surprise : la Cour de cassation donne raison au locataire. Elle reconnaît qu’il pouvait suspendre le paiement du loyer sans même mettre le bailleur en demeure de réparer. Le tout, sur la base du principe d’exception d’inexécution.
Ce que dit le droit : l’exception d’inexécution
L’article 1219 du Code civil dispose que :
» Une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave. »
Appliqué aux baux commerciaux, cela signifie que si le bailleur ne respecte pas son obligation de délivrance ou d’entretien, et que cela rend les locaux inexploitables, le locataire peut suspendre son obligation de payer. Ce que la Cour de cassation confirme ici, en allant plus loin : cette suspension ne nécessite pas de mise en demeure préalable. En clair, pas besoin pour le locataire de notifier officiellement au bailleur son intention de suspendre les loyers. Cela change radicalement la manière d’aborder la gestion des impayés.
Les conséquences concrètes pour les bailleurs
⚠️ Le locataire peut réagir immédiatement en cas de local inexploitable, sans avoir à avertir le bailleur par voie formelle.
Ce droit, validé par la Cour de cassation dans sa décision du 18 septembre 2025, permet une suspension des loyers quasi instantanée, créant une perte de revenus soudaine et potentiellement lourde pour le bailleur.
Dans ce contexte, la charge de la preuve change de camp. Le bailleur doit être en mesure de prouver que les locaux étaient exploitables, que les troubles signalés étaient mineurs, ou qu’il a pris toutes les mesures nécessaires dans des délais raisonnables pour remédier aux problèmes. En cas de litige, si le juge estime que le local était effectivement impropre à son usage commercial, la clause résolutoire prévue au bail pour impayés peut ne pas suffire à obtenir la résiliation du contrat.
Ce type de contentieux peut s’avérer long, coûteux et complexe, car il suppose de produire des expertises techniques, des échanges entre les parties et de justifier l’intégralité des démarches engagées en tant que bailleur.
Comment les investisseurs peuvent se protéger intelligemment
🔍 L’entretien préventif des locaux est plus qu’une obligation technique, c’est une stratégie juridique. Assurer la solidité de la toiture, l’étanchéité, la ventilation, le bon état des canalisations et des parties communes n’est pas un luxe : c’est une protection contre le risque d’exception d’inexécution.
Il est essentiel de garder une traçabilité de toutes les interventions effectuées sur l’immeuble. Cela passe par des rapports techniques, des devis, des comptes rendus d’intervention, des correspondances avec les prestataires. En cas de contestation, ces éléments peuvent faire la différence.
La rédaction du bail doit également être soignée. Il est recommandé d’anticiper ce type de situation en prévoyant des clauses relatives aux obligations d’information, aux mécanismes de réparation, aux délais de réaction, voire à des expertises amiables. Plus le contrat est clair, moins le risque de contentieux est grand.
Pour conclure :
| Situation | Impact pour le bailleur | Réflexe à adopter |
|---|---|---|
| Local rendu inutilisable | Suspension immédiate du loyer | Inspection technique régulière |
| Aucune mise en demeure | Difficile d’anticiper la suspension | Surveillance et dialogue permanent |
| Charge de la preuve inversée | Le bailleur doit prouver sa bonne foi | Documentation systématique |
Le locataire peut suspendre les loyers si le local devient inexploitable sans avoir besoin de mettre en demeure le bailleur. Ce droit repose sur un fondement légal solide, validé par la Cour de cassation. Le bailleur doit donc anticiper ce risque en entretenant ses locaux avec rigueur, en réagissant rapidement à toute alerte et en prévoyant contractuellement les éventuelles difficultés.
Cette jurisprudence rappelle une réalité fondamentale : un bien immobilier est un actif vivant. Il ne suffit pas de le louer, il faut le maintenir dans un état conforme à sa destination. Car dans un bail commercial, la non-exécution d’une obligation essentielle peut inverser l’équilibre du contrat.
La vigilance et la préparation sont les meilleures armes pour les bailleurs qui souhaitent garder la main sur leur patrimoine locatif.

